CLDM des militaires non imputable au service : gare à la diminution de votre solde !
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Le congé de longue durée pour maladie (CLDM) est attribué aux militaires, qui ont épuisé leurs droits à congé maladie (ou à congé du blessé) et qui sont atteints de cancer, de déficit immunitaire, ou de troubles mentaux ou de comportement incompatibles avec le service.
Selon que les circonstances de la pathologie concernée par le CLDM est, ou non, reconnue comme ayant un lien avec le service, la durée du CLDM et le montant de la solde du militaire concerné varient grandement.
Le refus de reconnaissance de l’imputabilité au service de la maladie d’un militaire a donc des répercussions importantes sur sa rémunération.
Tout militaire qui estime que son affection est en lien direct avec le service et qui se voit notifier une décision de refus de reconnaissance d’imputabilité au service de sa pathologie devra donc veiller à contester cette décision devant la commission des recours des militaires (CRM), dans un délai de deux mois à compter de sa notification.
1.- Condition d’attribution, durée et rémunération du CLDM
Le congé de longue durée pour maladie (CLDM) est attribué aux militaires, après épuisement des droits à congé de maladie ou des droits à congé du blessé, lorsqu’ils sont atteints d’affections cancéreuses, de déficit immunitaire grave et acquis, ou de troubles mentaux ou de comportement présentant une évolution prolongée et dont le retentissement professionnel ou le traitement sont incompatibles avec le service (articles L. 4138-12 et R. 4138-47 du code de la défense).
Lorsque la maladie concernée est reconnue imputable au service, le CLDM est attribué pour une durée maximale de 8 ans dont 5 ans à pleine rémunération et 3 ans à demi-solde.
Lorsque l’affection n'est pas reconnue imputable au service, le CLDM est attribué de manière différenciée selon qu'il s'agit d'un militaire de carrière ou d'un militaire sous contrat, et selon la durée de service du militaire sous contrat (article L. 4138-12 du code de la défense) :
- Le militaire de carrière bénéficie d'un droit à CLDM d'une durée de 5 ans maximum, dont 3 ans à pleine rémunération et 2 ans à demi-solde
- Le militaire sous contrat ayant plus de trois ans de service, bénéficie d'un droit à CLDM d'une durée de 3 ans, dont 1 an à pleine rémunération et 2 ans à demi-solde
- Le militaire sous contrat ayant moins de trois ans de service militaire bénéficie d'un droit à CLDM pour une durée d'un an maximum et ce, sans rémunération.
Le refus de reconnaissance de l’imputabilité au service d’une maladie a donc des conséquences importantes sur le montant de la rémunération des militaires concernés.
Il est donc essentiel, pour tout militaire, de savoir si son affection devrait ou non, être reconnue comme ayant un lien direct avec le service.
2.- Présomption et démonstration de l’imputabilité au service
Pour tous les fonctionnaires, y compris les militaires, certains accidents et maladies sont présumés avoir un lien direct avec le service et lui être imputables.
Il s’agit notamment des accidents survenus dans le temps et le lieu du service, et des maladies professionnelles énumérées dans le code de la sécurité sociale (article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) :
« (…) II.- Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service.
(…) IV.-Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau.
S’agissant spécifiquement des militaires, le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre ajoute plusieurs présomptions d’imputabilité s’agissant de blessures constatées par suite d’accident survenu à l’occasion du service, et de blessures ou maladies contractées notamment au cours de guerres ou d’opérations extérieures (OPEX) (article L. 121-2 du code des pensions militaires d’invalidités et des victimes de guerre) :
« Est présumée imputable au service :
1° Toute blessure constatée par suite d’un accident, quelle qu’en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, en l’absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l’accident du service ;
2° Toute blessure constatée durant les services accomplis par un militaire en temps de guerre, au cours d’une expédition déclarée campagne de guerre, d’une opération extérieure mentionnée à l’article L. 4123-4 du code de la défense ou pendant la durée légale du service national et avant la date de retour sur le lieu d’affectation habituelle ou la date de renvoi dans ses foyers ; (…)
4° Toute maladie constatée au cours d’une guerre, d’une expédition déclarée campagne de guerre, d’une opération extérieure mentionnée à l’article L. 4123-4 du code de la défense ou pendant la durée légale du service national, à compter du quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant la date de retour sur le lieu d’affectation habituelle ou la date de renvoi du militaire dans ses foyers. En cas d’interruption de service d’une durée supérieure à quatre-vingt-dix jours, la présomption ne joue qu’à compter du quatre-vingt-dixième jour suivant la reprise du service actif. » ;
En l’absence de présomption d’imputabilité au service de la maladie, il appartient au fonctionnaire ou au militaire concerné d’apporter la preuve que sa pathologie présente un lien direct avec le service et lui est imputable.
C’est ce que confirme l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée s’agissant de tous les fonctionnaires et l’article L. 121-2-1 du code des pensions militaires d’invalidité, s’agissant spécifiquement des militaires :
- « (…) Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du Code de la Sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu’elle est essentiellement et directement causée par l’exercice des fonctions et qu’elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d’Etat » (article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée)
« (…) Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux précités lorsque le militaire ou ses ayants cause établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions » (article L. 121-2-1 du code des pensions militaires d’invalidité).
A ce sujet, le Conseil d’Etat a précisé récemment qu’ « une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu’un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service » CE 13 mars 2019, req. n° 407795
Ainsi, lorsqu’un militaire estime que sa pathologie doit être reconnue comme étant imputable au service, il lui appartient d’en faire la demande à l’autorité militaire et de produire tout élément de preuve tendant à démontrer que sa maladie présente un lien direct avec l’exercice de ses fonctions ou de ses conditions de travail.
A l’appui de sa demande, le militaire pourra notamment produire des certificats médicaux établis par des médecins civils ou militaires, ou encore produire des témoignages et attestations de ses collègues ou de ses proches.
En cas d’éventuel refus de reconnaissance de l’imputabilité au service de sa maladie, le militaire concerné pourra toujours saisir la commission des recours des militaires d’un recours contre cette décision, dans un délai de deux mois à compter de sa notification et, le cas échéant, le tribunal administratif compétent.
Par Tiffen MARCEL, avocate en droit militaire, au barreau de Paris
Maître Tiffen MARCEL, avocate de militaires et de gendarmes, a fondé le cabinet Obsalis Avocat pour répondre aux problématiques rencontrées spécifiquement pas les militaires et les gendarmes de toute la France. Disposant d’une expertise reconnue dans la défense des militaires et des personnels de la gendarmerie nationale, Maître Tiffen MARCEL leur dédie son expérience dans tous les domaines du droit militaire : sanction disciplinaire, CLDM et imputabilité au service, indus de solde, jurisprudence Brugnot, procédure pénale, démission, résiliation de contrat, réclamations indemnitaires, etc.
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