Condamnations pénales des militaires, perte de grade et dispense d'inscription au B2 du casier judiciaire

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Lorsqu’un militaire a commis un délit qu’il reconnaît avoir commis, le procureur peut lui proposer un jugement sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC).

 

Dans cette hypothèse, le procureur de la République va proposer une ou plusieurs peines au militaire concerné, en contrepartie de sa reconnaissance des faits. Le jugement de condamnation sera ensuite homologué par un juge du tribunal correctionnel.

 

S’agissant des peines, le procureur de la République peut proposer des peines d’emprisonnement ou d’amende, avec ou sans sursis, ainsi que des peines complémentaires telles que la perte de droits civiques dont, notamment, l’inéligibilité ou le retrait du droit de vote.

 

Dans de tels cas, il est vivement conseillé aux militaires concernés de refuser les condamnations au titre de la perte de leurs droits civiques.

 

En effet, de telles condamnations peuvent conduire à une perte de grade et, ainsi, à la cessation de leur état de militaire :

 

 

L’article L. 4132-1 du code de la défense fait obstacle à ce qu’une personne privée de ses droits civiques ne possède la qualité de militaire :

 

« Nul ne peut être militaire :

1° S'il ne possède la nationalité française, sous réserve des dispositions de l'article L. 4132-7 ;

S'il est privé de ses droits civiques ;

(…)

Ces conditions sont vérifiées au plus tard à la date du recrutement.

Le mineur non émancipé doit être pourvu du consentement de son représentant légal ».

 

L’article L. 311-7 du code de justice militaire précise que la condamnation d’un militaire à une peine d’interdiction de ses droits civiques entraîne perte de grade :

 

« Toute condamnation à une peine d'interdiction des droits civiques ou d'interdiction d'exercer une fonction publique, prononcée par quelque juridiction que ce soit contre tout militaire, entraîne perte du grade.

Lorsque ce même militaire est commissionné, elle entraîne la révocation ».

 

De plus, l’article L. 4139-14 du code de la défense prévoir que la perte de grade entraîne automatiquement la cessation de l’état militaire :

 

« La cessation de l'état militaire intervient d'office dans les cas suivants :

1° Dès l'atteinte de la limite d'âge ou de la limite de durée de service pour l'admission obligatoire à la retraite, dans les conditions prévues aux articles L. 4139-16 et L. 4141-5 ;

2° A la perte du grade, dans les conditions prévues par le code de justice militaire ou à la suite de la perte de la nationalité française ; (…) ».

 

 

Enfin, l’article 131-26 du code pénal prévoit l’inéligibilité et l’interdiction du droit de vote au nombre des interdictions de droits civiques qui peuvent être prononcés à titre de sanction pénale :

 

« L'interdiction des droits civiques, civils et de famille porte sur :

1° Le droit de vote ;

2° L'éligibilité ;

3° Le droit d'exercer une fonction juridictionnelle ou d'être expert devant une juridiction, de représenter ou d'assister une partie devant la justice ;

4° Le droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations ;

5° Le droit d'être tuteur ou curateur ; cette interdiction n'exclut pas le droit, après avis conforme du juge des tutelles, le conseil de famille entendu, d'être tuteur ou curateur de ses propres enfants.

L'interdiction des droits civiques, civils et de famille ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit.

La juridiction peut prononcer l'interdiction de tout ou partie de ces droits.

L'interdiction du droit de vote ou l'inéligibilité prononcées en application du présent article emportent interdiction ou incapacité d'exercer une fonction publique. »

 

Notons que l’article susvisé 131-26 du code pénal dispose expressément que l’interdiction du droit de vote ou l’inéligibilité emporte interdiction d’exercer une fonction publique.

 

En cas de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), les militaires doivent donc réfléchir à deux fois avant d’accepter une peine d’interdiction de leur droit de vote ou d’inéligibilité, qui pourrait entraîner perte de grade et cessation de leur état de militaire.

 

Le cabinet d’avocat en droit militaire, Obsalis Avocat, assiste et représente les militaires dans le cadre des CRPC et les conseille dans leurs recours contre les décisions portant perte de grade et cessation de leur état militaire.

 

. Cependant, l’article 775-1 du code de procédure pénale prévoit le relèvement de toutes les interdictions et incapacités si la condamnation est dispensée d’inscription au bulletin n°2 du casier judiciaire (B2) :

 

« Le tribunal qui prononce une condamnation peut exclure expressément sa mention au bulletin n° 2 soit dans le jugement de condamnation, soit par jugement rendu postérieurement sur la requête du condamné instruite et jugée selon les règles de compétence et procédure fixées par les articles 702-1 et 703. Les juridictions compétentes sont alors composées conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 702-1.

L’exclusion de la mention d’une condamnation au bulletin n° 2 emporte relèvement de toutes les interdictions, déchéances ou incapacités de quelque nature qu’elles soient résultant de cette condamnation ».

 

Le Conseil d’Etat a déjà pu annuler la radiation des cadres d’un fonctionnaire faisant suite à une condamnation au titre de l’interdiction de ses droits civiques, alors que cette condamnation n’avait pas été inscrite au bulletin judiciaire n°2 :

 

« Considérant qu'aux termes de l'article 775-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de l'article 51 de la loi du 11 juillet 1975, "l'exclusion de la mention d'une condamnation au bulletin n° 2 emporte relèvement de toutes les interdictions, déchéances ou incapacités de quelque nature qu'elles soient résultant de cette condamnation" ; que l'application de ces dispositions, dans le cas d'une condamnation, emporte relèvement de l'incapacité prévue par l'article 65 de la loi susvisée des 15-27 mars 1850 sur l'enseignement en vertu duquel "est incapable de tenir un établissement public ou libre d'instruction secondaire, ou d'y être employé, quiconque est atteint de l'une des incapacités déterminées par l'article 26 de la loi .." lequel renvoie aux interdictions des droits civiques, civils et de famille prévus en cas de condamnation à l'article 42 du code pénal ; qu'elle a également pour portée d'emporter relèvement de l'incapacité prévue par l'article 50 de l'ordonnance du 4 février 1959 ; qu'ainsi le ministre de l'éducation nationale en radiant M. X... du corps des professeurs d'enseignement technique théorique en raison de la condamnation prononcée par l'arrêt du 12 novembre 1981 de la Cour d'Appel de Saint-Denis de la Réunion alors que ledit arrêt ordonnait que la condamnation ne fût pas inscrite au bulletin n° 2 de son casier judiciaire, a retenu à l'appui de sa décision un motif erroné en droit ; que s'il allègue que les faits à raison desquels est intervenue la condamnation susrappelée de M. X... étaient de nature à fonder une mesure disciplinaire de radiation, il ne résulte pas des pièces du dossier qu'ait été suivie la procédure prévue par l'article 31 du décret susvisé du 23 mai 1975 relatif au statut particulier des professeurs et des professeurs techniques chefs de travaux des collèges d'enseignement technique ; » (CE, 10 décembre 1986, req. n°50059).

 

S’agissant spécifiquement des militaires, la Cour de cassation a également jugé que la dispense d’inscription au casier judiciaire de la condamnation d’un militaire entraînait relèvement de la perte de grade :

 

« ATTENDU QU'APRES AVOIR DECLARE LE LIEUTENANT X... COUPABLE, NOTAMMENT, DU DELIT DE VOL ET AVOIR PRONONCE CONTRE LUI LA PEINE DE CINQ MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, EN DECIDANT QUE CETTE CONDAMNATION SERAIT EXCLUE DU BULLETIN N° 2 DU CASIER JUDICIAIRE, LE TRIBUNAL MILITAIRE AUX ARMEES A DIT QUE CETTE EXCLUSION EMPORTAIT RELEVEMENT DE LA PERTE DU GRADE PREVUE PAR LES ARTICLES 369 ET 370 DU CODE DE JUSTICE MILITAIRE ;

ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, LE JUGEMENT ATTAQUE N'A EN RIEN VIOLE LES TEXTES VISES AU MOYEN ; QU'EN EFFET, SELON L'ARTICLE 775-I DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DONT LES DISPOSITIONS SONT, AUX TERMES DE L'ARTICLE 358 DU CODE DE JUSTICE MILITAIRE, APPLICABLES AUX CONDAMNATIONS PRONONCEES PAR LES JURIDICTIONS DES FORCES ARMEES, L'EXCLUSION DE LA MENTION D'UNE CONDAMNATION AU BULLETIN N° 2 EMPORTE RELEVEMENT DE TOUTES LES DECHEANCES DE QUELQUE NATURE QU'ELLES SOIENT RESULTANT DE CETTE CONDAMNATION ; QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;» (Cass. Crim., 14 juin 1979, n° 78-94.086).

 

Ainsi, dans l’hypothèse où un militaire serait radié des cadres par suite d’une condamnation à une peine d’interdiction de ses droits civiques, il pourrait contester cette décision si sa condamnation a été dispensée d'inscription au bulletin n°2 de son casier judiciaire.

 

En cas de proposition de condamnation à une peine d’interdiction de droit civique et notamment à une peine d'inéligibilité, il est donc vivement conseillé aux militaires concernés de la refuser ou de ne l’accepter que si elle n’est pas inscrite dans son casier judiciaire.

 

Le cabinet d’avocat en droit militaire, Obsalis Avocat, conseille les militaires dans leurs recours contre les décisions prononçant la cessation de leur état de miliaire, notamment par suite de perde de grade et de condamnation pénale.

 

 

Par Tiffen MARCEL, avocate en droit militaire, au barreau de Paris

 

Maître Tiffen MARCEL, avocate de militaires et de gendarmes, a fondé le cabinet Obsalis Avocat pour répondre aux problématiques rencontrées spécifiquement pas les militaires et les gendarmes de toute la France. Disposant d’une expertise reconnue dans la défense des militaires et des personnels de la gendarmerie nationale, Maître Tiffen MARCEL leur dédie son expérience dans tous les domaines du droit militaire : sanction disciplinaire, CLDM et imputabilité au service, indus de solde, jurisprudence Brugnot, procédure pénale, démission, résiliation de contrat, réclamations indemnitaires, etc.

 

 

Pour en savoir plus sur la révocation des militaires, la perte de grade et les condamnations pénales, retrouvez les articles du cabinet Obsalis Avocat sur le même thème : 

 

 

 

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