Jurisprudence Brugnot et indemnisation des militaires : vous pouvez demander une expertise judiciaire
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La jurisprudence Brugnot permet aux militaires et aux gendarmes d’obtenir réparation de leurs préjudices résultant de leurs accidents ou maladies de service dans un délai de 4 ans à compter de la consolidation de leur dommage.
Lorsque la maladie ou l’accident est ancien, c’est donc la date de consolidation du dommage qui va permettre de savoir si l’indemnisation au titre de la jurisprudence Brugnot peut être accordée aux militaires concernés.
Dans ce cas, il est possible de saisir le juge administratif d’une demande de désignation d’un expert judiciaire, afin qu’il détermine la date de consolidation du dommage et son lien éventuel avec le service.
Le cabinet d’avocat de militaires, Obsalis Avocat, assiste et représente les militaires dans leurs demandes indemnitaires et dans leurs recours tendant à la désignation d’experts judiciaires en vue de la détermination de la date de consolidation de leur dommage et de l’imputabilité au service de leur affection :
De longue date, le Conseil d’Etat a reconnu aux militaires et aux gendarmes, outre le versement de leur pension militaire d’invalidité (PMI), le droit à l’indemnisation de leurs préjudices extrapatrimoniaux tirés de la survenue d’un accident ou d’une maladie imputable au service (Conseil d’Etat, 1er juillet 2005, req. n°258208) :
« Considérant que ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un militaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique ; qu'alors même que le régime d'indemnisation des militaires serait plus favorable que celui consenti aux agents civils, ces dispositions ne font cependant pas obstacle à ce que le militaire, qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de l'Etat qui l'emploie, même en l'absence de faute de celui-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique ; qu'il en va de même s'agissant du préjudice moral subi par ses ayants droits ; que ces dispositions ne font pas plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre l'Etat, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager sa responsabilité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait ; ».
Cet arrêt du Conseil d’Etat permet ainsi aux militaires et aux gendarmes, victimes d’un accident ou d’une maladie de service, d’être indemnisés des souffrances physiques ou morales en résultant ainsi que des préjudices sexuels, esthétiques, et d’agrément.
La réparation de ces préjudices doit être sollicitée par les militaires et les gendarmes dans un délai de 4 ans à compter de la consolidation de leurs dommages :
- « Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». (article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics)
- « 3. S'agissant d'une créance indemnitaire détenue sur une collectivité publique au titre d'un dommage corporel engageant sa responsabilité, le point de départ du délai de prescription prévu par ces dispositions est le premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les infirmités liées à ce dommage ont été consolidées. Il en est ainsi pour tous les postes de préjudice, aussi bien temporaires que permanents, qu'ils soient demeurés à la charge de la victime ou aient été réparés par un tiers, tel qu'un organisme de sécurité sociale, qui se trouve subrogé dans les droits de la victime » (CE, 20 novembre 2020, req. n°434018).
Toutefois, il convient de rappeler que la prescription ne court pas contre le militaire qui peut être regardé comme ignorant l’existence de sa créance sur l’Etat :
« La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement » (article 3 de la loi susvisée la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968).
A cet égard, la cour administrative d’appel de Marseille a jugé que la prescription ne court pas contre le militaire qui n’est pas en mesure de disposer d’indications suffisantes concernant l’imputabilité ou non du fait dommageable et la personne publique qu’il met en cause :
« 6. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, la prescription ne court pas contre le créancier " qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance. " ; qu'il en résulte que le délai de prescription ne court pas à l'encontre d'une victime qui n'est pas en mesure de connaître l'origine du dommage ou du moins de disposer d'indications suffisantes selon lesquelles ce dommage pourrait être imputable au fait de la personne publique ; que le requérant a eu connaissance du fait générateur des préjudices subis le 12 décembre 2008 au plus tôt, date de la décision par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a considéré que l'arrêté ministériel du 6 décembre 1994 était illégal ; qu'il suit de là que le délai de prescription quadriennale qui a commencé à courir le 1er janvier 2009 n'était pas venu à expiration lorsque M. B... a saisi le ministre de l'intérieur d'une réclamation le 29 septembre 2009 ; que, par suite, l'exception de prescription quadriennale opposée par le ministre doit être écartée ; » (CAA de MARSEILLE,, 29 mars 2016, req. n°14MA02012).
D’autre part, lorsque la date de consolidation du dommage a fait obstacle à ce que le militaire victime ait pu être indemnisé de ses préjudices, elle ne fait pas obstacle à ce qu’il soit indemnisé des préjudices nouveaux résultant de l’aggravation de son état de santé depuis la date de consolidation (CAA Bordeaux, 12 novembre 2020, req. n°19BX00464) :
« 3. Par ailleurs, la consolidation de l'état de santé de la victime d'un dommage corporel fait courir le délai de prescription pour l'ensemble des préjudices directement liés au fait générateur qui, à la date à laquelle la consolidation s'est trouvée acquise, présentaient un caractère certain permettant de les évaluer et de les réparer, y compris pour l'avenir. Si l'expiration du délai de prescription fait obstacle à l'indemnisation de ces préjudices, elle est sans incidence sur la possibilité d'obtenir réparation de préjudices nouveaux résultant d'une aggravation directement liée au fait générateur du dommage et postérieure à la date de consolidation. Le délai de prescription de l'action tendant à la réparation d'une telle aggravation court à compter de la date à laquelle elle s'est elle-même trouvée consolidée ».
Or, il arrive parfois que des militaires ou des gendarmes, qui ont subi un accident ancien, se retrouvent tardivement sans disposer de certificat de consolidation et sans savoir si leur accident devrait être reconnu comme étant imputable au service.
Cette circonstance fait obstacle à la possibilité qui leur est offerte de solliciter l’indemnisation de leurs préjudices au titre de la jurisprudence Brugnot et/ou de formuler des demandes de pensions militaires d’invalidité.
Dans une telle hypothèse, les militaires et les gendarmes peuvent envisager de saisir le juge des référés du tribunal administratif en vue de la désignation d’un expert judiciaire, ayant pour mission de déterminer la date de consolidation de leur dommage, leur éventuelle imputabilité au service et leur taux d’invalidité :
« Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l’absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction » (article R. 532-1 du code de justice administrative).
Le rapport de l’expert judiciaire ainsi désigné, qui devra alors fixer la date de consolidation des dommages, déterminer leur éventuelle imputabilité au service et évaluer leur taux, permettra ainsi au militaire ou au gendarme concerné de savoir s’il est opportun, ou non, de saisir l’Etat d’une demande indemnitaire au titre de la jurisprudence Brugnot ou d’une demande de PMI :
En cas d’éventuel refus de PMI passé et non contesté dans les délais, le militaire concerné pourrait également envisager d’engager la responsabilité de l’Etat du fait de l’illégalité fautive de ce refus et/ou de déposer une nouvelle demande de PMI.
Dans une affaire remportée par le cabinet Obsalis Avocat, le juge des référés a considéré que la demande d'expertise présentait une utilité et devait être ordonnée pour permettre au militaire concerné de savoir s'il pouvait être indemnisé au titre de la jurisprudence Brugnot ou bénéficier d'une PMI (TA Versailles, ord. 22 mai 2023, req. n°2208665) :
"4. L’expertise demandée, qui vise à déterminer le caractère imputable au service des accidents de travail subis et permettre au tribunal d’évaluer les préjudices subis par M. S, présente un caractère utile et entre dans le champ d’application des dispositions précitées de l’article R. 532-1 du code de justice administrative. Par suite, il y a lieu de faire droit à sa demande et de fixer la mission de l’expert comme il est précisé à l’article 1er de la présente
ordonnance".
Le cabinet d’avocat en droit des militaire, Obsalis Avocat, conseille et représente les militaires dans leurs démarches indemnitaires au titre de la jurisprudence Brugnot et pour évaluer l’opportunité de contester un éventuel refus de PMI ou de saisir le tribunal administratif d’une demande d’expertise judiciaire.
Par Tiffen MARCEL, avocate en droit militaire, au barreau de Paris
Maître Tiffen MARCEL, avocate de militaires et de gendarmes, a fondé le cabinet Obsalis Avocat pour répondre aux problématiques rencontrées spécifiquement pas les militaires et les gendarmes de toute la France. Disposant d’une expertise reconnue dans la défense des militaires et des personnels de la gendarmerie nationale, Maître Tiffen MARCEL leur dédie son expérience dans tous les domaines du droit militaire : sanction disciplinaire, CLDM et imputabilité au service, indus de solde, jurisprudence Brugnot, procédure pénale, démission, résiliation de contrat, réclamations indemnitaires, etc.
Pour en savoir plus sur l'indemnisation des militaires au titre de la jurisprudence Brugno et la PMI, consultez les articles du cabinet Obsalis Avocat sur le même thème :
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