Propos discriminatoires tenus par des policiers, gendarmes et militaires sur WhatsApp : attention aux sanctions disciplinaires

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Les propos tenus par les policiers, gendarmes et militaires peuvent être qualifiés de manquements à la discipline si, par leur contenu, ils sont de nature à porter atteinte au bon fonctionnement du service et à porter le discrédit sur l’administration.

Les policiers, gendarmes et militaires doivent donc veiller à mesurer les propos qu’ils tiennent sur les réseaux sociaux et sur les groupes de discussion privés sous peine de voir leurs propos qualifiés de manquement au devoir d’exemplarité, d’honneur, de dignité et de risquer une sanction disciplinaire.



S’agissant des policiers et des gendarmes, l’article R. 434-12 du code de la sécurité intérieure dispose ce qui suit :

« Le policier ou le gendarme ne se départ de sa dignité en aucune circonstance.
En tout temps, dans ou en dehors du service, y compris lorsqu'il s'exprime à travers les réseaux de communication électronique sociaux, il s'abstient de tout acte, propos ou comportement de nature à nuire à la considération portée à la police nationale et à la gendarmerie nationale. Il veille à ne porter, par la nature de ses relations, aucune atteinte à leur crédit ou à leur réputation
 ».

S’agissant des militaires, en général, l’article L. 4121-2 du code de la défense énonce que :

« Les opinions ou croyances, notamment philosophiques, religieuses ou politiques, sont libres.

Elles ne peuvent cependant être exprimées qu'en dehors du service et avec la réserve exigée par l'état militaire. Cette règle s'applique à tous les moyens d'expression. (…) »

Par son jugement du 26 octobre 2021, le tribunal administratif de Rouen est venu apporter une précision s’agissant des propos racistes, misogynes, antisémites ou discriminatoires tenus par les policiers et les gendarmes sur des groupes de discussion privés, tels que Whatsapp.

En l’espèce, un gardien de la paix exerçant ses fonctions au sein de la police nationale avait tenu des proposes qualifiés de discriminatoires, via l’application Whatsapp, sur un groupe de discussion privé comportant des personnes extérieures à la police nationale, et ce, notamment pendant ses heures de service.

Ensuite de la découverte de ce groupe de discussion, le policier en cause a été sanctionné disciplinairement d’une révocation.

Il a contesté cette sanction au motif notamment que ses propos ont été tenus sur un groupe de discussion privé, protégés par le secret de la vie privée.

Par son jugement du 26 octobre 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa requête en jugeant qu’une sanction disciplinaire peut être prononcée à l’encontre d’un policier ou d’un gendarme du fait de propos déplacés dès lors qu’ils ont pour effet de perturber le bon déroulement du service ou de jeter le discrédit sur l’administration, quand bien même ils seraient tenus sur whatsapp :

« (…) La circonstance que les commentaires de M. A., fondement de la sanction en litige, ont été tenus via l'application WhatsApp, fussent-ils protégés par le secret de la vie privée, n'est pas de nature à priver de base légale la sanction prise à son encontre dès lors qu'un comportement dans la vie privée peut être de nature à justifier une sanction disciplinaire lorsqu'il est incompatible avec la qualité d'agent public, qu'il a pour effet de perturber le bon déroulement du service ou de jeter le discrédit sur l'administration. En outre, il ressort des pièces du dossier que la plupart des propos reprochés ont été émis par M. A. pendant le temps du service, à destination notamment de ses collègues et qu'il n'est pas établi que le paramétrage de l'application empêchait toute diffusion à des tiers au groupe de discussion, qui comprenait d'ailleurs des personnes extérieures à la police. Le moyen tiré de ce que les faits reprochés ont été commis en dehors du service doit donc être écarté » (TA Rouen, 26/10/21, req. n° 2004524).

A ce sujet, le tribunal a qualifié les propos tenus sur l’application Whatsapp par le policier en cause de manquement au devoir d’exemplarité, d’honneur et de dignité :

« (…) M. A. a gravement manqué aux devoirs d'exemplarité, d'honneur et de dignité qui lui incombaient en sa qualité de membre de la police nationale et d'encadrant, a porté atteinte à l'image de son corps, a jeté le discrédit sur l'administration et a perturbé le bon déroulement du service. En retenant le caractère fautif de ces faits et en prononçant à l'encontre de M. A. la sanction disciplinaire, relevant du 4e groupe, de révocation, le ministre de l'Intérieur n'a pas commis d'erreur d'appréciation ni adopté une sanction disproportionnée à la gravité des fautes commises. »

Toutefois, dans cette espèce, deux éléments déterminants ont semblé être de nature à caractériser la faute du policier concerné, à savoir, d’une part, que les propos tenus l’ont été pendant le temps du service et, d’autre part, que le paramétrage de l'application n’empêchait pas la diffusion des messages à des tiers au groupe de discussion alors que celui-ci comportait d’ailleurs des personnes extérieures à la police.

La question se pose donc de savoir si les mêmes propos, tenus exclusivement en dehors du service, dans un groupe de discussion privé ne comportant que des membres du personnels de la police nationale, auraient pu être considérés comme de nature à « perturber le bon déroulement du service ou de jeter le discrédit sur l'administration ».

Quoi qu’il en soit, il est vivement conseillé aux policiers, gendarmes ainsi qu’à tous les militaires, de veiller à mesurer les propos qu’ils tiennent, notamment par écrit, sur les réseaux sociaux, y compris sur des groupes de discussion privés.

Le cabinet d’avocat en droit militaire, Obsalis, accompagne les militaires, gendarmes et policiers dans le cadre des procédures disciplinaires engagées à leur encontre et pour contester, le cas échéant, le bien fondé des sanctions prononcées.

 

 

Par Tiffen MARCEL, avocat en droit militaire, au barreau de Paris.
 

Maître Tiffen MARCEL, avocate de militaires et de gendarmes, a fondé le cabinet Obsalis Avocat pour répondre aux problématiques rencontrées spécifiquement pas les militaires et les gendarmes de toute la France. Disposant d’une expertise reconnue dans la défense des militaires et des personnels de la gendarmerie nationale, Maître Tiffen MARCEL leur dédie son expérience dans tous les domaines du droit militaire : sanction disciplinaire, CLDM et imputabilité au service, indus de solde, jurisprudence Brugnot, procédure pénale, démission, résiliation de contrat, réclamations indemnitaires, etc.

 

 

Pour en savoir plus sur le devoir de réserve des militaires, consultez les articles du cabinet Obsalis Avocat sur le même thème : 

 

 


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